Sachant la faible place des sciences à l'école liée au recentrage vers les compétences fondamentales : lire, écrire, calculer (Crinon, 2008) et aux difficultés à les enseigner (Giordan, 1978 ; Orange, 2012), cette recherche qualitative repère comment enseignants et élèves s'emparent de textes informatifs pour problématiser (Fabre 1999, 2016 ; Orange, 2002, 2012) et/ou pour résoudre un problème (Astolfi, 2008 ; Astolfi et Demounem, 1996 ; Develay, 1992). Elle croise les didactiques des sciences s'appuyant sur l'interstructuration (Bru, 2006) et de la lecture-compréhension (Cèbe et Goigoux, 2013 ; Gaonac'h et Fayol, 2003 ; Jorro, 1999 ; Lafontaine, 2003 ; Rémond, 2012) pour une lecture en contexte (Rouet, 2003).
Dans trois classes de l'école primaire (CE2, CM1, CM2) de la banlieue est de Paris, dialogues et écrits d'élèves réalisés pendant une séance de science ont été recueillis et analysés.
Pour chaque dialogue, ont été comptabilisées les interventions de l'enseignant et des élèves. Parmi celles-ci, nous avons identifié celles qui semblaient hors-sujet, celles qui manifestaient une erreur dans la compréhension des textes. A aussi été cerné comment l'enseignant s'appuie sur eux et comment il y renvoie les élèves. Ce que ceux-ci disent à l'oral et dans leurs écrits a été comparé avec ce qui, dans chaque texte, est en rapport avec son rôle prévu soit pour problématiser le fonctionnement du cœur (CM2), soit pour avancer vers la solution d'un problème de disparition d'oiseaux (CE2, CM1).
Finalement, l'utilisation et la compréhension des textes par les élèves et la qualité des interactions langagières varient entre résolution de problème et problématisation, mais aussi en fonction de l'expertise de l'enseignant. Néanmoins, les élèves sollicités par les enseignants ont mobilisé des compétences en lecture-compréhension et ceux-ci ont instrumentalisé les textes pour cadrer et étayer les interactions langagières, accompagnant ainsi les élèves dans l'appropriation du fonctionnement d'une communauté discursive scolaire à caractère scientifique (Jaubert, 2007). Dans les séances de résolution de problèmes, certains élèves, du fait d'un malentendu sociocognitif (Bautier et Rayou, 2009), sont restés focalisés sur l'énigme sans percevoir l'enjeu scientifique. Dans la séance de problématisation, si beaucoup d'élèves ont accédé à ce processus grâce au cadrage serré de l'enseignante, leurs écrits en contiennent peu de traces.